Voici le premier article de notre série dédiée à l’Industrie 4.0 en partenariat avec Go Concept. Aujourd’hui, nous mettons la lumière sur la fabrication distribuée qui a été popularisée pendant la période COVID en réponse aux ruptures d’approvisionnement et aux problématiques de transport. Barthélémy, consultant chez Go Concept, nous explique les multiples atouts que représente ce modèle de production.
Pourquoi parle-t-on de fabrication distribuée ? Et quels sont les problèmes qu’elle cherche à résoudre dans l’industrie ?
On parle de fabrication distribuée en opposition à la fabrication classique ou même décentralisée pour répondre à de nombreuses problématiques. Cela permet de gagner en résilience, mais aussi en fiabilité, en réactivité et en adaptabilité face à un client, tout en se mettant en phase avec des exigences de production locale et responsable également.
Quelles sont précisément les caractéristiques de la fabrication distribuée et quel est son mode de fonctionnement ?
On va mettre en œuvre la fabrication de pièces qui se servent du tissu industriel local au plus proche du destinataire. La fabrication distribuée permet d’assumer et d’encourager ce qui pourrait paraître comme une opposition : le partage mondial des données et une fabrication qui se veut plus locale. Cela permet d’obtenir des solutions résilientes, adaptables, mais également une maîtrise technique par les acteurs de la production. Il s’agit de faire confiance à toute la chaîne et de réduire le risque.
L’économie du temps de transport et des risques liés à celui-ci permet de faire face à des problèmes de disponibilité, de logistique tout en étant socialement plus responsable.
En économisant également du temps de transport et les risques liés à celui-ci permet de faire face à des problèmes de disponibilité, de logistique et tout ça socialement en étant un peu plus responsable.
Peux-tu définir ce que l’on appelle le “tissu industriel local” ?
Le tissu industriel local évoque toutes ses composantes géographiques, bien sûr, mais également les composantes sociales et environnementales.
Le tissu social local permet à la fois de produire des pièces en sourçant les matières premières localement, mais également de former des ressources spécialisées dans ces matériaux et sur ces chaînes d’approvisionnement. Ces mêmes ressources seront ensuite en capacité de mettre en œuvre des besoins de plus en plus spécifiques.
Aujourd’hui, sommes-nous en capacité d’avoir un tel écosystème industriel ?
C’est la question des 5–10 prochaines années car c’est une problématique qui date d’avant le COVID ! En effet, depuis les années 2010-2013, certains domaines rencontrent des difficultés liées à ce sujet et la fabrication distribuée était déjà bien implémentée dans les esprits.
On peut penser à des initiatives comme Opendesk qui se sert du bois local pour aller fabriquer des meubles de designer au plus proche des clients afin d’éviter, entre autres, les problématiques des transports ; le projet RepRap qui permet de faire fabriquer par des paires des machines d’impression 3D ; ou le projet Arduino, qui se base sur un modèle open-source permettant de fabriquer en local ses propres cartes électroniques.
Un autre exemple français : La Poste. L’entreprise a été capable de développer cette stratégie à grande échelle. Par exemple, lorsque vous écrivez un recommandé sur leur site, il est imprimé directement dans le bureau de poste du destinataire et livré directement chez lui.
Cette idée illustre bien ce qu’est la fabrication distribuée.
Et on peut appliquer cela à beaucoup de domaines, notamment sur de la fabrication de pièces pour les clients directement pour l’industrie et pour les consommateurs ou pour les fournitures des manufacturiers.
Que préconiserais-tu à un manufacturier qui a son site de production et son site de conception dans des pays différents ?
Je lui préconise de se tourner vers le tissu industriel local en s’aidant de la chambre du commerce ou d’un expert du tissu industriel de son implantation pour trouver un ou des nouveaux acteurs locaux. Cela va sûrement demander quelques adaptations sur la conception des pièces. Elles pourront être produites par plusieurs acteurs locaux par exemple, et donc ne plus être liées à une seule usine en particulier. Il faut donc revoir les spécificités si elles sont très complexes, car elles ne seront plus liées à une seule usine en particulier. Mais cela sera vraiment bénéfique pour l’avenir de l’entreprise !
Comment la mise en place de la fabrication distribuée va-t-elle impacter les divers secteurs industriels ?
Je pense qu’il faut déjà mettre une limite à la fabrication distribuée, parce qu’elle ne va pas impacter la totalité de notre façon de faire. En tout cas, pas tout de suite. Elle va sûrement d’abord impacter les domaines où la pièce produite est peu sensible aux économies d’échelle.
Pour faire de la fabrication distribuée, il faut surtout créer une unité de production polyvalente pour qu’elle puisse accepter et gérer des commandes de différents bureaux d’études. Cette unité permettra également de remettre la compétence au premier rang en générant des besoins localement.
Est-ce que cette démarche va générer des problématiques de brevets entre les personnes qui vont concevoir et fabriquer les pièces ?
Aujourd’hui, il y a plusieurs exemples de fabrication distribuée, notamment quand la propriété intellectuelle est moins sensible que l’approvisionnement des pièces. En effet, quand les problématiques d’approvisionnement sont vraiment prioritaires par rapport à la protection de la propriété intellectuelle, la question ne se pose pas. Dans les cas où la question se pose, on dispose d’un Arsenal juridique qui existe aujourd’hui, notamment sur l’Open hardware, qui permet de faire voyager la donnée tout en gardant une certaine capacité à exercer des licences. Et aujourd’hui, un brevet n’est pas l’assurance de ne pas être copié mais plutôt d’assurer une poursuite judiciaire en cas de copie.
Cet article est basé sur le témoignage de Barthélémy dans le podcast Industrie 4.0 Merci encore Barthélémy pour ce retour d’expérience !